samedi 10 août 2013

PIERRE MOLINIER (1900-1976) I

 
 
"Notre mission sur la Terre est de transformer le monde en immense bordel"
 

 
Pierre Molinier-Portrait de jeunesse, autoportrait travesti
 
 

 
 

 
 

 
 

 
 
 
Pierre Molinier est né le 13 avril 1900 (Vendredi Saint) à Agen. Son père était peintre en bâtiment et décorateur spécialisé dans le faux marbre et le faux bois; sa mère était couturière et sa tante repasseuse. Enfant, il est élevé dans un environnement féminin. Sa scolarité se déroule chez les Frères des Ecoles chrétiennes d'Agen, et non pas, comme il le prétendait, chez les Jésuistes.

1913 Il commence à travailler avec son père comme apprenti-peintre et entre aux cours du soir de l'Ecole municipale de dessin d'Agen.

1918 Depuis longtemps amoureux de sa soeur cadette, il la photographie sur son lit de mort : il raconte qu'à cette occasion il lui a caressé les jambes et a joui sur la robe de Première Communiante qu'elle portait. Fantasme, invention ou réalité, début de mythomanie ? Néanmoins, c'est le point de départ de sa quête d'une identité androgyne. Vers cette date, il s'installe à Bordeaux, Place de la Bourse, dans le Quartier Saint-Pierre.

1919 Il commence à travailler pour son propre compte, en tant que peintre en bâtiment.

1920 Il effectue son service militaire de 1920 à 1922, puis fait un séjour à Paris, où il fréquente les musées.

1923 Il s'installe 5 rue du Parlement-Saint-Pierre, toujours dans le Vieux Bordeaux.

1927 Première exposition de ses tableaux. Jusqu'en 1951, il accroche chaque année plusieurs tableaux (des paysages et des portraits de style figuratif ou fauve) dans les Salons de peinture bordelais.

1928 Il expose un tableau à Paris, à la Société Nationale des Beaux-Arts, et fonde la Société des Artistes Indépendants Bordelais avec plusieurs autres peintres.

1931 Il s'installe dans l'appartement qu'il ne quittera plus, au 7 rue des Faussets, dans le Vieux Bordeaux.

1940 Il est mobilisé comme infirmier, fait prisonnier, puis démobilisé, avant de s'installer avec sa famille dans la campagne bordelaise. Première toile abandonnant le figuratisme pour l'abstrait (Satin blanc).

1944 Suicide de son père, par absorption de médicaments.

1946 Suite à la visite présumée d'envoyés du Dalaï-Lama, qui lui demandent de reproduire des mandalas, son inspiration évolue vers l'ésotérisme (Molinier situait, vaguement, cette visite vers 1936; au vu de l'évolution de son oeuvre picturale, 1946 serait beaucoup plus probable).

1948 Première toile caractéristique de la période érotique (Les amants à la fleur).

1949 Sa femme quitte le domicile conjugal.

1950 Il érige sa « Tombe prématurée » surmontée d'une croix noire portant comme inscription: « Ci-gît/Pierre MOLINIER/né le 13 avril 1900 mort vers 1950/ce fut un homme sans moralité/il s'en fit gloire et honneur/Inutile/de/P.P.L. » Il se photographie dans son atelier, les bras en croix, en suicidé, puis, dans son appartement, sur son lit de mort.

1951 Il coupe les ponts avec les Artistes Indépendants Bordelais, à la suite du scandale provoqué, au Salon d'Automne, par son tableau voilé, Le grand combat, qui représente un enchevêtrement de corps engagés dans une joute amoureuse.

1952 Il prend contact avec André Malraux pour exposer à Paris. Sa fille Françoise, dont il est amoureux depuis longtemps, quitte le domicile familial.

1955 Il écrit à André Breton et lui envoie un port-folio de photographies de ses oeuvres. André Breton se prend de passion pour ces « oeuvres magiques » et lui adresse une série de lettres enthousiastes (« Vous êtes aujourd'hui le maître du vertige »).

1956 A la suite de son exposition de 18 tableaux (et quelques dessins), dans la galerie parisienne de Breton A l'Etoile scellée (27 janvier-17 février), il collabore à plusieurs numéros de la revue Le surréalisme, même. Rencontre de l'écrivain-poète Joyce Mansour, « la Divine ». Il se lance dans la réalisation de photographies érotiques.

1957 Près de Bordeaux, il achète un bar louche (le Texas-Bar) pour sa prétendue « fille naturelle », Monique, prostituée notoire.

1960 Il gifle violemment sa femme, tire des coups de pistolet au-dessus de la tête de son cousin et passe un mois en prison. Il abandonne son activité de peintre en bâtiment pour se consacrer à son oeuvre d'artiste. Ses tableaux deviennent fortement érotiques : pour ses glacis, symboliquement, il mélange même son propre sperme aux pigments de couleur.

1961 Condamnation (amende et dommages-intérêts) pour les faits de 1960. Le divorce demandé par sa femme est prononcé.

1962 Début du tournage du film de Raymond Borde Molinier (à Bordeaux, projections privées en 1964 et projection publique de la version censurée en 1966).

1964 Il écrit à Emmanuelle Arsan (auteur du roman érotique Emmanuelle), puis fait sa connaissance à Paris en décembre. Tous deux s'engagent dans une correspondance enflammée et Molinier la met en scène dans plusieurs de ses oeuvres.

1965 Multiples rencontres avec les peintres surréalistes Clovis Trouille et Gérard Lattier. Tournage d'un film rudimentaire, Mes jambes. Son tableau blasphématoire Oh!... Marie, mère de Dieu (où deux femmes pratiquent une fellation et une sodomie sur un Christ crucifié) dissuade André breton de le montrer à l'Exposition Internationale du Surréalisme.

1966 Le projet de publication d'un album de photomontages sur Le chaman et ses créatures commence à prendre forme. Roland Villeneuve est pressenti pour la préface. De nombreux éditeurs renonceront à publier l'album, qui sera finalement édité en 1995. Ses photographies illustrent ses préférences sexuelles et certaines tendances paraphiliaques (masturbation, éjaculation précoce, sodomie avec godemichés, auto-fellation, masochisme, transvestisme et fétichisme).

1967 Seconde rencontre, à Bordeaux, avec Emmanuelle Arsan. Suite à sa relation épistolaire avec Peter Gorsen, il rencontre l'Allemande Hanel Koeck, fétichiste des jambes et des souliers, adepte du sado-masochisme. Débute une correspondance très abondante et passionnée avec elle. Hanel lui rendra plusieurs visites et servira de modèle à nombre de toiles et de photomontages. Tournage du film de Jean-Pierre Bouyxou Satan bouche un coin.

1969 Il dit avoir fait exhumer le corps de son père et conserve ses ossements dans une caisse en bois en forme de petit cercueil, rue des Faussets. Un album (Molinier) sur son oeuvre picturale paraît chez Jean-Jacques Pauvert.

1970 Ablation de la vésicule biliaire, qui le fait souffrir régulièrement.

1972 Il lègue son corps à la Médecine, afin d'être disséqué. Peter Gorsen fait paraître à Munich, avec une étude en allemand, un album de photos et de photomontages, Pierre Molinier, lui-même.

1975 En mars, il réalise une série de photos de travestis avec Luciano Castelli, jeune peintre suisse, puis avec Thierry Agullo, artiste bordelais iconoclaste, sur le thème de l'Indécence. A la fin du mois, il reçoit la visite de Peter Gorsen (pour la première et unique fois) et d'Hanel Koeck. En septembre, son fils Jacques meurt par accident (erreur de manipulation d'explosif). Il reprend contact avec sa fille Françoise.

1976 Fin février, il réalise avec Thierry Agullo une série de photos de travestis sur le thème de l'Androgyne. Il se suicide d'une balle dans la bouche, le 3 mars 1976, vers 19 heures 30. Son corps est transféré à l'Institut médico-légal puis à la Faculté de Médecine de Bordeaux. Après dissection, ses restes seront inhumés dans un cimetière bordelais.


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